LES ROUTES DE LA FOI.
Hébreux 11. 4-7
Nous avons tous notre idée sur ce qu’est une « vie de foi. » Nous prenons comme modèle Abraham, Moïse, David, Paul et, bien sûr, Jésus. Mais en nous focalisant sur tel exemple, nous risquons d’appauvrir notre perception de la foi.
L’auteur de la Lettre aux Hébreux, après nous avoir défini ce qu’est la foi, commence sa série d’exemples par trois patriarches : Abel, Hénoc et Noé... Et comme pour nous dérouter, ces trois croyants remarquables ont suivi des chemins très différents les uns des autres. Dieu se plaît à contrarier nos idées toutes faites de la « vie exemplaire. »
Trois existences qui, sur le plan humain, se contredisent, mais qui sont marquées par la même foi... par la même dimension essentielle qui, étonnamment, se cache derrière des apparences diverses. Alors, plutôt que vouloir soigner ces apparences, découvrons les facettes de la foi qu’elles révè¬lent.
I. ABEL, LE VRAI TRÉSOR (4).
Abel est le premier « héros de la foi » et son modèle est déroutant. Son parcours terrestre finit violemment : c’est plutôt raté, question réussite! Homme de foi... homme mort : où est l’erreur?
Mais l’erreur est en nous, qui si souvent pensons que la foi doit rendre notre existence confortable! Notre monde mise sur un « progrès » dont les buts principaux sont l’allongement de la vie, l’absence de lutte et l’épanouissement individuel. L’humanité veut se construire un paradis... mais l’entreprise n’est-elle pas vouée à se muer en pa¬radis artificiel?
Marc,8.35 Car celui qui voudra sauver sa vie la perdra, mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de la bonne nouvelle la sauvera.
Abel, par sa « foi sacrificielle » comme la décrit un commentateur, nous contraint à réviser nos va¬leurs. La vie présente n’est pas l’essentiel ! Abel, par sa foi, nous montre où sont les vrais trésors, les vraies sécurités...
A. GÉNÉROSITÉ.
La première preuve de la foi d’Abel réside dans le sacrifice qu’il a offert à Dieu. Il nous est dit qu’il était « meilleur » que celui de Caïn.
Certains voient la qualité de l’offrande en ce qu’elle consistait à verser du sang (Abel a offert du petit bétail, Caïn des végétaux). La différence réside bien plutôt dans l’attitude de l’un et de l’autre :
Abel a offert les premiers-nés avec leur graisse ; Abel a donné ses prémices à Dieu, l’avenir de son troupeau, la richesse de sa production. Abel a placé ses richesses « dans le ciel », c’est-à-dire entre les mains de Dieu.
de Caïn, la genèse nous dit seulement qu’il a offert des fruits du sol. Caïn, lui, s’est réservé : il a préféré protéger sa prospérité...
Luc,6.38 Donnez, et il vous sera donné: on versera dans votre sein une bonne mesure, serrée, secouée et qui déborde; car on vous mesurera avec la mesure dont vous vous serez servis.
• Où est notre richesse? Où est notre trésor? En Christ ou sur terre?
• La foi doit nous mener à une rupture d’avec l’esprit de surconsommation qui emporte notre so¬ciété dans un tourbillon ivre d’achats et dans une course aux nouveaux besoins...
B. IDENTITÉ.
Abel, vous le savez sans doute, signifie littéralement : « buée, vapeur. » C’est le même terme qu’utilise l’Ecclésiaste pour exprimer la « vanité. » Ce nom, il a dû le subir : vous voyez-vous affublé du prénom de « Riendutout » ou de « Nul¬los »? De plus, son frère avait un prénom signifiant « acquis », parce qu’Ève mettait l’essentiel de ses ambitions en lui...
Question « standing », Abel était mal parti dans la vie : être confiné au rôle de second n’est pas très valorisant. Ne dit-on pas « Caïn et Abel »? Mais Dieu va rendre témoignage à la foi du « looser » et agréer son offrande. Abel a du prix aux yeux de YHWH, qui poursuivra Caïn pour meurtre.
Abel a trouvé son identité profonde, non dans la valeur que les hommes plaçaient en lui, mais dans la relation de confiance qui l’attachait à Dieu.
La foi nous amène à trouver auprès de Dieu une vraie identité.
Notre bien-être dépend souvent des louanges des hommes, ou notre mal-être de leurs impréca¬tions, mais l’exemple d’Abel nous engage « nous trouver » auprès de notre Créateur, auprès de notre Père!
C. EXEMPLARITÉ.
Enfin, Abel « nous parle, mort, de sa foi. »
Notre instinct nous pousserait à croire que c’est Caïn, le survivant, qui a la “bonne part”! Mais l’Évangile ne promeut pas une survie terrestre : il nous appelle à la vie éternelle.
La mort physique et tragique d’Abel ne déprécie pas sa foi, au contraire : son assassinat, injuste, est un révélateur des valeurs essentielles qui gouvernaient ce jeune homme!
Héb 11.13 : C'est dans la foi qu'ils sont tous morts, sans avoir obtenu les choses promises; mais ils les ont vues et saluées de loin, reconnaissant qu'ils étaient étrangers et voyageurs sur la terre.
Où est notre vie? Est-elle cachée en Christ?
Quelle notre priorité ? Aménager notre survie, en attendant la mort, ou servir le Ressuscité qui nous donne l’éternité ?
II. HÉNOC, LA COMMUNION (5-6).
Et voici un exemple pour le moins contrasté! Hénoc, lui, par la même foi, échappe à la mort! Il ne partage ce privilège qu’avec un seul homme : Élie... Il nous est dit qu’ Hénoc a été « transféré » parce qu’il « plaisait » à Dieu. C’est-à-dire qu’il avait une relation de confiance et d’amour avec son Dieu. Et la foi engage à une telle communion.
L’auteur des Hébreux nous dit qu’on ne peut plaire à Dieu sans la foi...
A. PROXIMITÉ.
La foi d’ Hénoc, implique qu’il faut s'approcher de Dieu. La foi engage à une « relation de proximité » avec Dieu.
Jean,13.25 Et ce disciple, s’étant penché sur la poitrine de Jésus
Plus : à un mouvement entretenu, concret vers Dieu.
Engageons le dialogue avec Dieu! Notre foi nous mène-t-elle à une quête active de la personne du Christ ? Cherchons, frappons à la porte, demandons !
Jacques,4.8 Approchez-vous de Dieu, et il s’approchera de vous
B. FIDÉLITÉ.
La foi consiste à croire que « Dieu est. »
Ça semble si primaire! Et quelqu’un me citera Jacques, qui nous rappelle que les démons eux-mêmes croient en l’existence de Dieu et qu’ils en tremblent! Mais ici, nous ne sommes pas appelés à une croyance purement intellectuelle en l’existence de Dieu!
Quand nous sommes submergés par les épreuves, déboussolés par les obstacles qui nous effraient, dépouillés de nos forces physiques et morales... bref, quand tout semble nous dire : « Dieu n’existe pas! » là, en nous, surgit la foi qui affirme, contre toute raison : « Si, Dieu existe! »
Demandons au Seigneur cette foi fidèle, qui surmonte les doutes et ose croire malgré tout!
C. ATTENTE.
Dieu est le « rémunérateur de ceux qui le recherchent. » Héb 11.6 : Or sans la foi il est impossible de lui être agréable; car il faut que celui qui s'approche de Dieu croie que Dieu existe, et qu'il est le rémunérateur de ceux qui le cherchent.
Dieu répond aux prières!
Si Abel nous enseigne à ne pas fonder notre vie sur le terrestre, Hénoc nous enseigne à croire au Dieu proche, qui ne reste pas passif quand nous le cherchons.
Ainsi, la foi n’ est ni une machine à valeurs terrestres, ni une résignation fataliste!
Que l’ Esprit insuffle en nous une foi audacieuse! une foi qui espère et attend de Dieu!
III. NOÉ, L'APPLICATION (7).
Et voici un troisième chemin, qui diffère aussi étonnamment des deux autres.
Noé aurait pu être englouti par le Déluge, subissant les effets de la méchanceté humaine dans une foi inébranlable, à l’image d’Abel. Ou, au contraire, à l’image d’un Hénoc, se voir porter par un moyen surnaturel au-dessus des cieux...
Eh bien non! Il échappe à la catastrophe en construisant un paquebot zoologique!
Ni martyre romantique, ni miracle purement surnaturel : plutôt, une application de la volonté de Dieu, en usant de moyens somme toute logiques...
Le chemin de Noé nous enseigne aussi sur la foi.
A. ÉCOUTE.
En premier lieu, Dieu parle à son serviteur : c’est donc que Noé écoutait! Quel contraste entre cette humble disponibilité et une certaine image de la foi qui engage le croyant à décréter de lui-même ce que Dieu veut, sans le consulter, et à donner des ordres à celui qu’ il appelle paradoxalement son « Seigneur. »
La foi ne doit pas être pour nous un « moyen de pression » sur Dieu : cela révélerait une bien triste relation avec lui!
La foi nous amène à écouter le Seigneur, à être près de son cœur, à unir notre pensée à la sienne et, ainsi, à demander ce qui est dans sa volonté...
Mieux vaut « vouloir ce que Dieu veut » qu’essayer de contraindre Dieu à « vouloir ce que nous voulons »!
B. MOBILISATION.
Noé s’est donc mis au travail... Il a dû couper du bois (gare aux échardes!), le scier, le clouer (at¬tention aux doigts!) puis couvrir la coque de bitume (oh, les taches et les odeurs!)...
Il a fallu, aussi, s’occuper des animaux : lourde charge ! Pourquoi Dieu n’a-t-il pas fait apparaître par miracle une arche toute prête? Parce qu'il travaille avec nous.
La foi n’implique pas une intervention divine hors de notre réalité humaine : même pour nous sau¬ver, le Fils s’est incarné...
Cessons de trop séparer le miraculeux du naturel : Dieu agit au travers de nous!
Le miracle n’exige pas de notre part une passivité : c’est en nous engageant, en agissant que nous voyons la grâce du Seigneur se déployer!
C. RÉVÉLATION.
Enfin, la démarche de foi de Noé a révélé des vérités fondamentales. D’ une part, elle a dénoncé la perversité d’un monde incrédule. D’ autre part, elle a révélé que Dieu déclare juste celui qui met sa confiance en Lui.
La foi ne concerne pas notre seule relation individuelle avec Dieu ; elle doit nous mener à être des témoins de la vérité : tant celle de la situation mortelle d’ une vie en rupture avec Dieu, que la bonne nouvelle du salut gratuitement conféré à quiconque met sa foi en Jésus-Christ.
CONCLUSION.
Trois chemins si différents! Trois chemins approuvés de Dieu !
Qu’ elle nous mène sur la voie d’ Abel ou d’ Hénoc ou de Noé, demandons à notre Seigneur de nous donner la foi.
Une foi qui mise sur les valeurs éternelles, qui engage à une communion intime avec Dieu et qui nous engage à appliquer les directives du Seigneur par les moyens qu’ il a choisis.
Et veillons à ne pas juger hâtivement des itinéraires de foi des uns ou des autres !
Gardons les yeux fixés sur Jésus-Christ, notre vie, notre amour, notre maître !