CHARISMES ET CHARISMATIQUES
LECTURE
Nombres 9/15-23
INTRODUCTION
L’exercice des dons spirituels a continué jusque dans le deuxième et le troisième siècles. Mais, graduellement, la manifestation des dons a disparu dans une église qui perdait de sa vitalité. Au lieu de reproduire la doctrine du Nouveau Testament concernant les dons et leur pratique dans l’Eglise, les leaders ont rationalisé leur absence. Ils ont développé une interprétation de la Bible qui leur expliquait que le miraculeux n’était lié qu’au premier siècle de l’Eglise et que, de toute manière, on n’en avait guère plus besoin aujourd’hui.
La hiérarchie professionnelle a souligné l’importance de l’autorité ecclésiastique aux dépens de l’expression religieuse individuelle. Après le troisième siècle, il y a eu un glissement du ministère comme charisme au ministère comme office (fonction). Le résultat s’est retrouvé dans l’institutionnalisation de certains dons.
Plus tard, bien qu’avec la Réforme, on ait redécouvert une partie plus importante de l’enseignement du Nouveau Testament, la plupart des dons spirituels ont été associés étroitement avec les charges de pasteur, ancien et diacre. Il ne restait plus que quelques dons « disponibles » pour les laïques, à savoir le don d’exercer la miséricorde, celui de donner et d’encourager...
C’est au début du siècle que, grâce au réveil, on a retrouvé l’exercice des dons spirituels dans l’Eglise. Pendant longtemps négligée, cette activité « charismatique » redécouverte est expérimentée par un grand nombre de croyants.
I. LES DONS CHARISMATIQUES
Il y a deux raisons fondamentales pour lesquelles j’affirme que la liste des neuf dons spirituels n’est pas exhaustive :
A. Paul nous donne, comme nous l’avons déjà vu, des listes variées de dons spirituels ou de fonctions, et ces listes sont différentes. Cela ne devrait pas nous surprendre si nous gardons à la mémoire que les différents types de ministères sont des dons de Dieu à son peuple (Ephésiens 4/11).
Paul donne trois listes dans 1 Corinthiens 12 :
1. Aux versets 8-10, se trouve la liste des neuf dons : la parole de sagesse, la parole de connaissance, la foi, le don des guérisons, le don d’opérer des miracles, la prophétie, le discernement des esprits, le don des diverses langues, l’interprétation.
2. Au verset 28, Paul donne de l’importance aux trois premiers (apôtres, prophètes, docteurs) peut-être parce qu’ils demandent l’utilisation de la pensée, et certainement parce qu’ils concernent d’édification de toute l’Eglise dans l’Evangile. Viennent ensuite le don des miracles, les dons de guérir, secourir, gouverner, parler diverses langues. Certains manquent ici : interprétation, foi, discernement des esprits, parole de connaissance, parole de sagesse.
3. Aux versets 29-30, Paul donne encore une liste sensiblement différente : apôtres, prophètes, docteurs, don des miracles, dons des guérisons, parler diverses langues, interprétation.
Dans Romains 12/6-8, il mentionne la prophétie, le service , l’enseignement, l’exhortation, la libéralité, aider, la miséricorde.
Il devient précaire d’argumenter que l’une des listes fournies est exhaustive et définitive. Il semble évident que toutes ces listes cherchent à nous donner des exemples de ce que le Saint-Esprit fera dans la vie et par la vie des croyants.
B. La deuxième raison, c’est que le mot « charisme », qui dénote les dons spirituels, signifie littéralement « dons de charis ». Et en grec charis exprime l’amour de Dieu envers nous qui ne le méritons pas.
Le mot « charisme » est exclusivement paulinien à l’exclusion de 1 Pierre 4/10 qui nous encourage à pratiquer les dons que nous avons reçus (dons qui ne se trouvent pas dans les listes examinées ci-dessus !)
Paul utilise ce mot quelques 16 fois, et d’une façon assez variée :
- il explique que l’homme devrait payer de sa mort le salaire de sa désobéissance et de son péché, mais Dieu a fait un (« charisme ») don gratuit, celui de la vie éternelle (Romains 6/23) ;
- il l’utilise dans une occasion de délivrance miraculeuse de Dieu sans toutefois la préciser (2 Corinthiens 1/11) ;
- il souligne le choix de Timothée (1 Timothée 4/14 ; 2 Timothée 1/6) ;
- il spécifie le mariage comme le célibat par ce terme (1 Corinthiens 7/7).
Les charismes sont les dons gracieux de Dieu faits aux hommes. Etre chrétien, c’est donc être charismatique, mais pas dans le sens souvent évoqué aujourd’hui. Il ne doit plus y avoir de division entre « baptisés dans le Saint-Esprit » et « non-baptisés », car la volonté de Dieu à cet égard, c’est que tous soient inondés de ce fleuve vivant pour entrer dans la vie de l’Esprit.
II. DONS OU DONATEUR ?
A. Quelques dangers résident dans le fait de parler des dons spirituels comme étant une nécessité impérieuse pour notre temps et dans le fait de les rechercher ardemment.
1. Le premier, parce que l’on veut expérimenter plus, et davantage, c’est d’oublier que Christ, et Lui seul, est La bénédiction des croyants.
Toute théologie qui ajoute quelque chose à Christ se condamne elle-même. Comme, par exemple, celle qui affirme que Christ, oui, mais par delà Christ, vous avez besoin de l’Esprit...
2. Le deuxième, c’est d’exagérer l’importance du besoin de « puissance ». On commence alors à chercher des raccourcis pour obtenir la puissance. La réponse de Paul c’est de ne pas se glorifier de son pouvoir mais de sa faiblesse au travers de laquelle seulement la puissance de Christ pouvait luire.
La puissance de la résurrection est réelle et effective, mais elle ne doit pas occulter la nécessité de la croix dans l’expérience chrétienne.
3. Le troisième, c’est de vouloir des évidences.
lire : 1 Thessaloniciens 1/5
Voilà pourquoi le parler en langues, l’interprétation et la prophétie sont si estimés parmi nous. Les autres dons sont tout aussi estimables, mêmes s’ils ne sont pas autant visibles. Ne confondons pas spectaculaire et surnaturel.
4. Le quatrième, c’est de tomber dans les mêmes travers que l’Eglise de Corinthe, à savoir posséder tous les dons mais passer à côté d’une vie sanctifiée.
Il y a une différence entre les dons spirituels et le fruit de l’Esprit, mais Paul souligne l’inutilité des dons sans le fruit de l’Esprit manifesté dans le caractère du croyant. Le fait de posséder les dons n’est pas un raccourci à la vie de sanctification.
lire : 1 Thessaloniciens 4/7-8
B) Paul donne, de la part de Dieu, un commandement : celui d’être continuellement remplis du Saint-Esprit, non comme d’une chose ou d’une influence, mais de la troisième personne de la Trinité. Etre plein du Saint-Esprit, c’est lui laisser le contrôle total et la direction de notre vie. C’est lui permettre de glorifier Jésus en nous, comme il le veut et surtout quand il le veut.
N’oublions pas que le Saint-Esprit est une personne. Il n’est pas simplement une émanation de Dieu, comme l’expliquent les Témoins de Jéhovah, mais il est Dieu lui-même. Et s’il est Dieu, il faut qu’il retrouve la première place dans nos vies et dans nos églises. C’est-à-dire qu’il a trop souvent la place de l’étranger ou du visiteur, quand ce n’est pas qu’il n’a pas de place du tout. Nous sommes tellement pleins de nous-mêmes et des expériences que nous avons vécues que nous en oublions qu’il est le chef d’orchestre et qu’il doit tout diriger.
1. C’est le Saint-Esprit qui nous révèle le caractère et la personne de Dieu (1 Corinthiens 2/10).
2. Le Saint-Esprit, encore aujourd’hui, s’adresse aux croyants (Apocalypse 2/7).
3. Il a le rôle d’enseignant et remplace Jésus sur la terre (Jean 14/26).
Mais surtout, et pensons-y toujours, nous pouvons, par notre attitude et surtout par notre désobéissance, blesser le Saint-Esprit et obtenir par là même qu’il ne soit plus un allié.
lire : Esaïe 63/10, Ephésiens 4/30
III. LA NUEE SE DEPLACE ET LE PEUPLE AVEC
Les textes bibliques de l’Ancien Testament nous montrent que le peuple au désert est conduit par la nuée qui représente la présence de Dieu. Le Saint-Esprit a été donné à l’Eglise pour qu’elle avance.
Au désert, le peuple d’Israël ne demeurait pas où cela lui plaisait, ni le temps qu’il voulait, mais le textes des Nombres nous apprend que, chaque fois que la nuée avançait, le peuple avançait ; quand elle s’arrêtait, le peuple s’arrêtait.
Nous essayons trop souvent de canaliser le Saint-Esprit comme on canalise un ruisseau pour fertiliser une terre... sauf que le Saint-Esprit est souverain et qu’il agit où il veut et quand il veut et surtout comme il veut. Ne nous fions pas à notre compréhension naturelle des choses de Dieu.
lire : Jean 3/8
Le Saint-Esprit va vite et nous désirons demeurer dans la nuée.
lire : Galates 3/5
Le verbe « accorder » en grec : épichorégon = chorégraphe.
Le Saint-Esprit agit comme un chef d’orchestre divin, ou plus exactement comme celui qui, lors d’une représentation de danse, a coordonné les mouvements avec la musique en en réglant les détails les plus précis.
Paul et Silas ont été poussés par le Saint-Esprit à chanter dans la prison de Philippe et c’est cela qui a provoqué leur délivrance.
Si nous voulons demeurer dans le courant de l’action du Saint-Esprit aujourd’hui, il nous faut suivre la nuée... C’est sa présence qui garantit notre succès.
CONCLUSION
La vie charismatique est indispensable à l’Eglise parce qu’elle remet la personne du Saint-Esprit à la première place. Elle a aussi bouleversé le traditionalisme pesant, la formalité en supprimant la prédictivité dans l’adoration (on peut dire, dans certaines rencontres à l’avance ce qui va se passer: « ... un chant, une prière, un chant, l’adoration, la Sainte Cène, l’offrande, la prédication... ».
Pour demeurer dans ce fleuve de vie, il ne faut pas tomber dans un autre formalisme ou dans une autre tradition mais vivre dans une dépendance totale à l’Esprit.